Que penser du lait…? (3)

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Que penser du lait…? (1)

Que penser du lait…? (2)

Si l’on se penche sur l’histoire relativement récente du lait, on constate qu’il y a eu des bouleversements majeurs qui ont influé sur la qualité de cet aliment. De sorte que quand M. Bourre ou M. Souccar parlent du lait ou des produits laitiers, ils citent des études se basant sur des aliments modernes qui ne sont que le pâle reflet des aliments d’autrefois.

Quels sont ces bouleversements ?

Directement sur l’aliment :

  • L’upérisation, stérilisation du lait, encore plus poussée, qui est l’origine l’étiquette UHT que l’on retrouve sur les produits basiques, et signifie Upérisation à Haute Température (et non Ultra-haute-température !)

Indirectement via l’animal producteur :

  • Nourriture destinée aux animaux : arrêt de l’alimentation traditionnelle à base d’herbes (notamment fourragères), et passage à une alimentation à base de blé, maïs, soja, – voire farines animales si on veut compléter ce musée des horreurs alimentaires – )
  • Mode de vie des vaches (CAFO – voir plus bas -), usage effrené d’antibiotiques, hormones de croissance, sélection de vaches toujours plus productives, etc. (toutes sortes de choses qui sont arrivées au cours du 20ème siècle)
  • D’ici quelques années, probablement : irruption des OGM sur la nourriture (manque de recul pour le moment)

Disons-le clairement : le lait fait partie des aliments les plus modifiés, c’est un digne représentant de la Tragédie des Transformés. Au même titre que le blé, seul le soja, cet aliment caméléon fait probablement pire. En prenant deux secondes de réflexion, il est évident qu’ainsi, on ne parle plus du lait ou des laitages qui ont nourri l’humanité depuis quelques millénaires, mais de produits dignes de Frankenstein.

Du coup, je ne m’étonne plus des résultats des études citées par M. Souccar : sans être allé vérifier, ces études font très certainement référence aux laits et produits laitiers les plus disponibles dans le commerce : soit du lait pasteurisé, upérisé, homogénéisé, produit par une vache nourrie à tout, sauf ce qui est bien évidemment prévu pour son corps de ruminant. Rien que la production de l’IGF-1 est bien moins importante (mais pas nulle, certes) selon la nourriture de l’animal !

Le livre le plus complet sur le sujet, a été écrit par un américain naturopathe, Ron Schmid. Hélas non traduit en France, The Untold Story – Green Pastures, Contented Cows and Raw Dairy Products – (L’histoire Cachée du Lait – Verts Pâturages, Vaches Bien Traitées et Produits au Lait Cru) est une bible à lui-seul.

ron schmid

Les Etats-Unis ont été une terre laitière, liée à celle des descendants d’européens, emportant avec eux les vaches du Vieux Continent. Dois-je réellement rappeller ce qu’a été la conquête de l’Ouest ? Un cow-boy est littéralement un garçon vacher (l’expression est délicieusement désuète, certes). De tout les colons, ceux qui mangeaient le plus de fromage, étaient les colons bataves, que l’on surnommait fréquemment Jan Kaas (John Cheese en anglais). Et cette expression est restée, et sert à nommer depuis l’ensemble des américains (plutôt blancs) : Yankees.

Le parti pris romantique, non sans quelques références à la mythologie, cède peu à peu face aux réalités du début du 20ème siècle : quelques scandales (toujours aux USA) à propos des bactéries accusent à tort le lait cru (nota : pour les défenseurs de la pasteurisation/upérisation, cela n’est PAS une controverse, ils ont évidemment *raison*). La pasteurisation devient ainsi recommandée. Et depuis, elle est quasiment incontournable, c’est le choix de l’industrie laitière. Le problème est que le lait pasteurisé (ou même upérisé/stérilisé) n’est pas plus sûr ! On perd au passage de nombreuses enzymes (dont certaines…découpent le lactose, lors de la fermentation) et vitamines liposolubles présentes dans le lait, dégradant ainsi les nombreuses qualités nutritives du lait. Ces scandales ont éclaté dans des circonstances particulières qu’il est impossible de résumer ici. De nombreux peuples consomment ou ont consommé des aliments à base de lait cru, sans souffrir le moins du monde de maladies associées à des bactéries (citons au hasard les campylobacter). On y comprend donc pourquoi l’hygiénisme à tout-va n’est pas justifié : Ron Schmid en profite pour citer l’illustre français Claude Bernard avec sa notion de milieu intérieur. Il semblerait que les personnes en contact régulier avec des souches de salmonelles ou d’E. Coli (tristement célèbre en ce moment) via le lait cru soient plus résistantes face aux souches dangereuses. C’est Paracelse qui marque un point face à Pasteur…

L’homogénéisation en prend aussi pour son grade : il semblerait que cela soit ce processus, et non la qualité des graisses qui soit responsable d’un lien entre maladies cardiovasculaires (via la xanthine oxydase). Le lien entre lait et cancer semble contrecarré par la fameuse vitamine D : la vitamine D semble être un puissant anti-cancer, encore faut-il la trouver dans l’alimentation si l’on évite le soleil…c’est le cas dans les laitages crus, non écrémés (encore une tare de l’époque actuelle !) ! Il en est de même avec l’acide linoléique conjugué (CLA) : son taux est maximal quand l’animal a été nourri correctement (avec de l’herbe si vous suivez), et qu’il n’a pas été élevé de manière honteuse façon CAFO : Confined Animal Feeding Operations, ce qu’on appelle le Factory Farming, des fermes inhumaines où les animaux en batterie sont confinés en permanence et ne voient pas la lumière du jour. Intuitivement, un animal élevé de manière aussi sale, ne peut pas donner un lait, même cru – peu souvent le cas en pratique – sain.

Le lait…cru, et les produits assimilés (yahourt, fromages, etc.) provenant de vaches saines (ou d’autres mammifères, ne soyons pas spécistes), ne sont donc ainsi, pas seulement de simples aliments nourrissants, mais ont également des bienfaits. Pensez aux bienfaits du kéfir (visiblement, pas un mythe), ou tout simplement au yahourt au lait de brebis qui permis de guérir ses problèmes digestifs (monsieur était céliaque ou sensible au gluten peut-être ?). Weston Price lui-même, fit la constatation que les tribus les plus vigoureuses et saines (pas de caries…pas de cancer…pas d’ostéoporose non  plus…) étaient celles qui consommaient des aliments au lait cru. Il cite notamment les suisses de la Vallée du Lötschental qui ont une forme insolente ; «This resulted in a very liberal use of dairy products…». Une des explications de cette forme peut-être le fameux activateur X, dénommé ainsi par Weston Price : il s’agirait selon toute vraisemblance de la vitamine liposoluble K. On comprend bien qu’en maltraitant les vaches, qu’en pasteurisant, upérisant, homogénéisant le lait, on perd les avantages précieux des laitages crus. Voire même cela peut devenir dangereux…ce qui rejoindrait éventuellement, à ce moment-là, les conclusions de M. Souccar.

De même la référence à l’expérience des chats de Pottenger qui étaient malades, voire même stériles avec de la nourriture cuite (dont du lait) n’est pas fortuite et abonde dans son sens. De manière générale : si l’on maltraite les vaches, et que l’on utilise des procédés technologiques en usine, il ne faut pas s’étonner que l’on se retrouve avec des aliments qui se rapprochent nutritionnellement du plastique : d’un aliment vivant on passe peu à peu à un aliment mort, sans intérêt, des calories vides.

Cet ouvrage, de manière générale, est donc un véritable réquisitoire contre les laits transformés (soit directement, soit indirectement), et à l’inverse, une véritable ode au lait cru. Je n’insiste pas sur le chapitre concernant l’hypothèse lipidique, il est tout à fait dans la lignée de Mary Enig ou Sally Fallon (qui préface le présent livre) de la Weston A. Price Foundation qui réhabilite les graisses naturelles (dont les saturées). On peut lire un texte de Ron Schmid, traduit par Maurice Legoy, ici.

Toutefois un rattrapage pour ceux qui ne sont pas adeptes de la langue de Shakespeare : Taty Lauwers a publié il y a quelques années un ouvrage résumant bien la philosophie de pensée et les découvertes de Weston A. Price (et de sa fondation).

Taty Lauwers

C’est un livre que j’ai découvert très récemment, qui a l’avantage de faire une synthèse intéressante, et qui au final assez proche de la mienne (avant de le lire). On y apprend toutefois que la race de vache a un impact sur la qualité des produits (mais en citant la jersiaise, cela n’aide pas beaucoup les français, qui consomment davantage du lait d’autres races), que les laitages des autres animaux (brebis, chèvres, juments) sont probablement plus sains…parce que la production est plus artisanale, que le plus ardent défenseur du lait cru en francophonie est un…québécois répondant au nom prédestiné de Carol Vachon. La question des allergies sensibilités et autres intolérances y est abordée avec pédagogie, elle tient à distinguer les trois.  Même si les produits laitiers en général peuvent être bons, certains individus ont des déficiences métaboliques qu’il faut savoir repérer, via un allergologue par exemple. A titre personnel, j’ai appris que les fromages bien affinés possèdent des protéines décomposées sous formes d’amines, telles que la tyramine par exemple, celles-ci pouvant causer ou aggraver les insomnies. Et après tests personnels, je confirme bien cet effet indésirable ! Aussi, un mythe est savamment démonté : il a été observé plusieurs fois des chiens, des chats, des animaux domestiques, buvant le lait à même les mamelles des vaches ! Voici un exemple d’espèces (adultes !) buvant le lait d’une autre !

Si vous deviez vous procurez un seul bouquin sur le lait, cela serait probablement celui-là.

5 commentaires sur “Que penser du lait…? (3)

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  1. Merci, super série d’article. Je suis toujours choqué de ces experts stars qui détruisent le lait systématiquement. De mon expérience, oui, c’est un aliment qui peut être néfaste surtout pour quelques problèmes de santé spécifiques, mais comme tout aliment dans un régime omnivore il a sa place et est précieux. Quand on voit un comparatif de vitamines entre lait de vache et lait de brebis ya pas photo aussi, on gagnerait à alterner, diversifier ses laits : le lait de jument (fort consommé en Mongolie il me semble, où ils en font même un alcool…), de chamelle, de bufflonne, etc.

  2. Bonjour ! SVP, veuilez consulter mon site web, http://www.bonlait.com. Ex-chercheur universitaire, doctorat et postdoctorat…, mon orientation subséquente vers les approches naturelles m’a mis sur la piste du vrai lait, ainsi qu’à la rédaction à compte d’auteur du livre, «Pour l’amour du bon lait», dont on a dit en France qu’il était alors le seul faisant la différence scientifique entre le bon et le mauvais lait. Taty Louwers, en faveur du bon lait, a malheureusement découragé les lecteurs avec sa page couverture affreuse. Pourtant ses jugements y sont bons.

    Dr Carol Vachon, Physiologie, B.Sc. Biol.
    Consultant en nutrition, Québec.
    C.P. 39001, 2750 ch. Sainte-Foy, Québec G1V 4W8
    418-650-0169 800-933-5248
    http://www.bonlait.com

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